la justice face aux passifs-agressifs

Que peut-on attendre de la justice face aux passifs-agressifs ?

Il y a quelques temps, une lectrice du site m’a envoyé une question que je recopie ci-dessous…

En résumé, cette lectrice se demande s’il est possible de se libérer d’un conjoint passif agressif  (ou au moins de faire cesser ses agissements abusifs) grâce à la justice.

Je profite de cet article pour remercier toutes les personnes qui m’envoient des messages.

Il ne m’est évidemment pas possible de vous répondre individuellement par mail en proposant des réponses adaptées à la situation spécifique de chacun.

Mais vos questions sont toujours des sources d’inspiration pour continuer à vous proposer des articles traitant de sujets qui vous intéressent.


Note : Pour la facilité de l’écriture et de la lecture,  j’utilise en majorité le genre masculin pour évoquer les Passifs-Agressifs. Par extension, j’évoquerai donc plutôt les pères passifs-agressifs.

Mais le discours est tout aussi valable dans les cas où ce sont les femmes/mères qui sont porteuses de ce trouble de la personnalité.

Ce qu’il faut savoir avant d’aller en justice


Tout d’abord, il est important de savoir que ce n’est pas dans le cadre d’une procédure en justice qu’il faut attendre une réparation de tous les abus que vous avez dû subir au sein du couple et de la relation parentale.

Je soulève d’emblée ce point car, la plupart du temps, le choix d’aller en justice face à un passif-agressif provient du besoin qu’une autorité tranche et déclare enfin que l’autre agit mal.

Il est évidemment tout à fait légitime de ressentir ce besoin mais malheureusement c’est rarement la justice qui va pouvoir le combler.

La justice a comme objectif d’établir ce qui est légal. Elle ne cherchera pas à établir ce qui est moral.

Bien souvent, ce n’est pas pour les petites adaptations de pension alimentaire supplémentaires qu’un(e) ex- conjoint(e) de passif-agressif va en justice. Ce n’est pas non plus pour les quelques petits changements dans le mode de garde.

Le moteur principal est un moteur de reconnaissance. Et si c’est avec ce moteur là que l’on va en justice on risque la déception voire une grande désillusion (j’y reviendrai plus tard).

Par contre, si vous savez que vous n’obtiendrez pas réparation affective de la justice, et que vous prenez conscience que la réparation ne viendra que de vous, alors, la procédure peut être un véritable travail sur vous-même.

Ce qu’il ne faut pas attendre de la justice :

  • Qu’elle reconnaisse le trouble de personnalité de l’autre.
  • Qu’elle se positionne de votre côté et vous reconnaisse comme la VRAIE victime.
  • Qu’elle voie clair dans les mensonges et les manigances de l’autre.
  • Qu’elle détermine qui a tort ou qui a raison dans les manières d’éduquer les enfants.
  • Qu’elle protège vos enfants des dysfonctionnements du passif-agressif.
  • Quelle valide le fait que vous êtes une « bonne » mère ou un « bon » père.

Un de mes amis qui est juge me disait : « Tu sais, si je devais croire tout ce que les gens me racontent, je n’en sortirais plus » .

(Quand des amis se séparent et que chacun raconte sa version, il est bien difficile pour vous de savoir quel parti prendre… Alors, imaginez des juges qui entendent tous les jours des hommes et des femmes se charger mutuellement !)

N’attendez donc pas de la justice qu’elle se prononce sur les dysfonctionnements de votre ex Passif-Agressif ou qu’elle lui fasse la leçon… Ce ne sera pas le cas…

Une femme que j’accompagne m’expliquait que son ex (pervers narcissique) roulait à 200 à l’heure sur l’autoroute avec les enfants à l’arrière et leur faisait téléphoner à leur mère pour la terroriser (sans se soucier que ses propres enfants étaient terrorrisés aussi).

La juge en charge du dossier, informée de ce genre de faits par la psychologue à qui les enfants s’étaient confiés n’a jamais fait aucune remarque au père sur ce sujet.

Dès lors, vous pensez bien que quand il s’agit « simplement » d’oublier d’aller les chercher à l’école, aucun juge ne se prononcera.

Et ce n’est sans doute pas sa mission d’éduquer des parents défaillants.

Ce sera votre mission à vous de combler les failles et les négligences du (de la) PA que vos enfants ont comme parent.

Ce que vous pouvez attendre de la justice :

  • Qu’elle détermine ce qui est légal et ce qui ne l’est pas (en termes financiers et modalités de garde).
  • Qu’elle mette un cadre auquel vous pourrez toujours vous référer dans vos interactions futures avec l’autre.
  • Le cas échéant, qu’elle fixe une pension alimentaire (sans que vous sachiez toujours bien comment les calculs ont été faits).
  • Qu’elle détermine ce qui constitue des frais extraordinaires (mais tout ce qui n’est pas explicitement cité sera toujours contesté par le PA).

D’autre part, une procédure en justice qui vous oppose à la manipulation (que ce soit face à une personnalité perverse narcissique ou passive-agressive), sera toujours un combat difficile (comme chaque interaction même minime avec ce genre de personnalité).

Vous osez vous opposer à lui (à elle), vous osez prendre à témoin des tierces personnes (avocats, juges…), attendez-vous à ce que  la malhonnêteté sournoise du Passif-Agressif explose.

N’oubliez pas : il  a des droits mais quand vous, vous essayez de faire respecter les vôtres (et ceux de vos enfants), avec la paranoïa* qui le caractérise, il ne peut y voir qu’une tentative de le détruire.

Et puisque évidemment le passif-agressif joue la Victime* et vous dépeint comme le plus horribles des Bourreaux, la fibre de Sauveur qui vibre en tout avocat va se réveiller très intensément chez celui ou celle qu’il choisira.

Avocat qui ira donc au front comme s’il s’agissait de terrasser le dragon (vous).

Ne vous attendez-donc pas à un combat à la loyale… et préparez-vous à halluciner.

NB :*Pour (re)lire les caractéristiques du passif-agressif  :

cliquez ici

Bien se préparer pour la procédure en justice


Bien vous préparer psychologiquement va être indispensable pour faire face aux inévitables bombes auxquelles vous allez être confronté(e).

La clé de la stratégie du passif agressif va être (comme toujours) de se présenter comme la pauvre victime.

Pour cela, il va focaliser le débat sur vous de manière à détourner l’attention de ses propres manquements et de ses propres erreurs.

Mais n’ayant pas grand-chose à vous reprocher concrètement, il utilisera des arguments fallacieux pour essayer de vous détruire. La fin justifie les moyens.

Lorsque quelqu’un est dans son droit, il n’a pas besoin de travestir la réalité… Lorsqu’on est droit dans ses bottes, il n’est pas nécessaire d’essayer de détruire l’autre.

Les faits suffisent…

L’avocat du passif agressif n’ayant rien de bien concret contre vous dans son dossier devra donc faire des entourloupes pour essayer de gagner.

Il y a donc un grand risque que vous deviez faire face à toute une série de sophismes.

Un sophisme est une argumentation à la logique fallacieuse.
C’est un raisonnement qui cherche à paraître rigoureux mais qui n’est en réalité pas valide au sens de la logique. À la différence du paralogisme, qui est une erreur dans un raisonnement, le sophisme est fallacieux : il est prononcé avec l’intention de tromper l’auditoire afin de prendre l’avantage dans une discussion.Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Sophisme

La finalité des sophismes est donc bien de manipuler la vérité.

Malheureusement, ils sont très efficaces pour convaincre… Et si on ne sait pas reconnaître ces arguments fallacieux, il est impossible de s’en défendre.

La description des sophismes  va peut-être vous paraître un peu complexe car c’est très théorique mais cela vous aidera beaucoup de connaître les « trucs et astuces » que votre ex PA (et son avocat) vont utiliser.

De cette manière, non seulement vous ne serez pas complètement paralysé(e) en prenant en pleine face ces horreurs que vous n’imaginiez même pas possible, mais surtout, vous serez prêt(e) à y répondre sans vous laisser démonter.

Apprenez à les identifier afin d’avoir les antidotes en réserve lors de la comparution.


Voici une infographie assez bien faite qui reprend les différentes catégories de sophismes :


Dans une formation destinée aux avocats dont je vous mets une capture d’écran, vous pourrez voir que, parmi les conseils donnés aux étudiants, le formateur explique certains procédés qui peuvent être utilisés pour discréditer la thèse de l’adversaire.

Et entre autres : « Le registre satirique : Il s’agit de dénoncer les défauts des autres par l’ironie (antiphrases, caricatures, figures d’exagréation, naïveté feinte, éloge paradoxal, allusions et sous-entendus) ».

Un passif agressif  a expliqué à son fils qui s’étonnait de trouver de gros mensonges dans les conclusions de son avocate :  « Une procédure en justice c’est comme un combat de boxe : le but est de gagner. Et pour gagner, tous les coups sont permis. »

Waouw ! Cela fait froid dans le dos !

Alors que vous pensez que la finalité d’une procédure en justice est de trouver une solution équitable, alors que vous imaginez qu’au-délà de vos divergences d’opinion, la volonté de votre ex est (comme la vôtre), de déterminer ce qui est le meilleur pour vos enfants, vous risquez de vous retrouvez sur la scène d’une pièce de théâtre dans laquelle l’autre vous force à endosser le rôle du monstre !

C’est peut-être pour cela que les avocats portent encore une robe… comme un costume qui leur permet d’endosser un rôle en laissant leurs scrupules au vestiaire.


justice - argumentation

Source : La construction des écritures judiciaires – Cifaf Formation :  http://slideplayer.fr/slide/5399803/


La justice ne vous apportera pas de réparation affective


Vous l’avez compris, l’avocat de votre ex (PA ou PN) va se servir de tout ce qui existe et même de ce qui n’existe pas…. S’il n’a rien contre vous, ce n’est pas grave, il l’inventera.

A tel point que la procédure en elle-même peut représenter un véritable traumatisme (supplémentaire)…

N’envisagez donc à aucun moment de recevoir la reconnaissance de votre statut de victime et focalisez-vous sur votre objectif principal (obtenir une pension alimentaire, obtenir la garde des enfants, changer le mode de garde…)

Verrouillez votre stratégie et nous vous en écartez pas malgré les provocations…

Ramenez sans cesse le débat sur l’objectif concret , sans vous laisser piéger par toutes les fausses pistes qui seront présentées.

Malgré toutes ces mises en garde, ne croyez pas que je vous déconseille de lancer une procédure en justice.

Au contraire, elle peut s’avérer indispensable pour mettre un cadre strict à un certain nombre de points sur lesquels votre ex passif-agressif n’aura plus la possibilité de vous faire enrager en s’opposant systématiquement à tout ce que vous demandez (même les choses les plus basiques).

De plus, cette procédure va vous donner l’occasion da faire un énorme travail sur vous-même qui vous renforcera par rapport à certaines de vos fragilités (celles dont vous étiez déjà porteuse mais aussi celles qui ont été creusées par toutes ces années de relation avec ce PA).

Mais surtout faites-vous accompagner par un(e) thérapeute durant cette la démarche. Car n’oubliez pas que pendant toutes ces années, vous avez cru, au moins en partie, que ce que le passif-agressif disait de vous était la vérité et que c’était vous qui étiez irrationnelle ou trop exigeante ou….

La manipulation entraîne la victime dans une grande confusion mentale et ce processus sera amplifié et aggravé par l’avocat du PA.

Un accompagnement professionnel vous permettra de sortir de cette confusion et de cesser de douter du bien-fondé de votre raisonnement et de vos demandes.

Cela sera une telle caricature exagérée de tous les dysfonctionnements que vous avez rencontrés par le passé que cela vous permettra de les voir comme s’ils étaient écrits en gras et surlignés en fluo.

Et si vous avez encore le moindre doute quant à son besoin compulsif de s’opposer à vous de manière irrationnelle, après la procédure vous n’en aurez plus.

Si vous portez encore de la culpabilité, des doutes, ou la sensation d’être la « méchante », les délires de ses argumentations vous démontreront que, si de vous deux il y en a un qui est fou, ce n’est pas vous !

Et c’est de cette prise de conscience que viendra votre guérison !


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Commentaires

  1. Bonjour Véronique ainsi qu’à la personne qui a posé cette question.
    J’ai vécu la même chose et je voulais apporter mon témoignage face à cette situation.
    En ce qui concerne la justice, c’est tout à fait ce que j’ai vécu, la parole de l’un contre la parole de l’autre jusqu’à ce qu’on demande une expertise psychologique et que mon fils soit entendu par le juge.
    Un combat éprouvant avec des vengeances surnoises du père dont ni mon fils ni moi ne sommes sortis indemnes.
    Mon fils a souffert de dépression et de graves troubles d’anxiété pendant 2 ans. J’ai mis toute mon énergie pour l’en sortir avec l’aide de psychologues.
    Aujourd’hui c’est un jeune homme pleins de projets, confiant et parfaitement épanoui.
    Là où je rejoins tout à fait Véronique c’est qUe même si la justice a reconnu les torts du père, je n’ai pas pris le temps de me faire moi-même aider et que je reste toujours à l’heure d’aujourd’hui dans une grande confusion mentale et dans le doute du bien- fondé de mon raisonnement.
    Je n’ai pas fait ce que Véronique conseille c’est à dire « faire un énorme travail sur vous-même qui vous renforcera par rapport à certaines de vos fragilités (celles dont vous étiez déjà porteuse mais aussi celles qui ont été creusées par toutes ces années de relation avec ce PA). »
    Juste une petite chose à rajouter c’est de ne pas croire que ce genre de père pensera avant tout au bien de son enfant.
    Merci Véronique pour ton article, bon courage à la personne qui a posé la question et prenez soin de vous

    1. Author

      Bonjour Karine,
      Je suis sincèrement heureuse d’apprendre que ton fils va beaucoup mieux et qu’il soit aujourd’hui complètement épanoui dans sa vie.
      Tu as raison d’ajouter que les pères passifs-agressifs ne se soucient pas du bien-être de leurs enfants dans le cadre d’une procédure en justice. Je n’ai sans doute pas assez insisté là-dessus.
      Mais en effet, étant donné que leur paranoïa contre leur ex est leur moteur principal, ils mènent la procédure en justice, non pas comme une recherche de trouver les meilleures solutions pour leurs enfants, mais bien comme un combat pour éviter de « se faire avoir par l’autre » (qui est leur plus grande peur). Cette paranoïa crée un tel biais cognitif que leur raisonnement ne peut plus être rationnel. C’est en cela que leurs argumentations tiennent du délire.
      Si tu as encore des doutes sur le bien-fondé de ton raisonnement, peut-être pourrais-tu te référer à ce que tu ce que tu constates quand tu observes comment ton fils a magnifiquement évolué.
      Si ton raisonnement et ton intuition n’étaient pas adéquats, aujourd’hui il ne serait pas devenu ce qu’il est.
      Observer les faits concrets peut nous permettre de voir enfin que nous pouvons nous faire confiance.
      D’autre part tu écris que tu n’as pas fait de travail en profondeur sur toi-même à l’époque, mais sans doute est-ce encore possible car il n’est jamais trop tard pour mieux se connaître et renforcer nos fragilités.
      Merci de ton message Karine…
      Je t’embrasse bien fort.
      Véronique.

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