choisir ses emotions

Choisir vos émotions : mission impossible ?

 

Vous êtes facilement submergé par vos émotions, et vous pensez que vous ne savez rien y faire ?

Vous subissez des sautes d’humeur et vous assistez aux conséquences, parfois regrettables, de vos réactions émotives ?

Vous avez la sensation de perdre beaucoup d’énergie dans les multiples remous émotionnels que vous vivez chaque jour ?

Vous vous dites que vous êtes hypersensible, vous pensez que c’est votre nature… Vous avez déjà essayé de changer mais vous n’y arrivez pas ?

Pourtant, il est possible d’apprendre à choisir les émotions que nous souhaitons ressentir…

Il est possible de transformer consciemment les circuits intérieurs de notre cerveau…

Et c’est facile !

 

Une histoire classique d’émotions qui explosent

 

Il y a quelques jours, au cours d’une soirée entre amis, un épisode un peu houleux a fait dévier la conversation sur mon sujet préféré à savoir la gestion des émotions.

Mais pour que vous compreniez bien mes propos , il est nécessaire que je commence par vous raconter le déroulement des événements…

Nous étions au restaurant et chacun avait choisi les plats et les boissons qui lui convenaient. Au moment de régler l’addition, il a été question de savoir comment partager les frais : allait-on diviser le tout en 8 ou chacun allait-il prendre en charge ses propres consommations ?

Ceux qui avaient consommé raisonnablement trouvaient que ce n’était pas juste qu’ils doivent participer aux frais de ceux qui avaient choisi les plats les plus chers et beaucoup bu… Et ceux qui étaient fatigués trouvaient cela ennuyeux de devoir faire des comptes d’apothicaires pour quelques euros…

Je suis certaine que vous voyez de quoi je parle… 🙂

Alors que, souvent, ce genre de question se résout facilement, dans un sens ou dans un autre, avec humour et en quelques minutes, il se trouve que, ce soir-là, deux des personnes présentes étaient un peu plus fragiles émotionnellement, un peu plus fatiguées ou un peu plus irritables que d’ordinaire…

Et, (par hasard ou parce que le destin voulait que j’aie de la matière pour cet article), chacune défendait une position qui représentait pour l’autre le « symbole » d’un point sensible.

La première, que je nommerai Aline, avait choisi une reconversion professionnelle et travaillait, non sans difficulté, l’acceptation d’une diminution de ses revenus et la peur de manquer qui en découlait. Son père ayant fait faillite alors qu’elle était adolescente, elle avait appris à compter ses dépenses et, après un beau succès professionnel qui l’avait amenée à un burn-out, son choix de reconversion bousculait ses peurs profondes. Vous aurez compris qu’aux yeux d’Aline, payer pour ceux qui avaient choisi les plats les plus chers était très perturbant.

L’autre que j’appellerai Jean-Michel, gardait au fond de lui un résidu bien tenace de résistance à la tyrannie de sa mère qui contrôlait ses moindres faits et gestes et voulait le façonner selon ses propres besoins à elle.  L’idée de devoir contrôler ses envies personnelles pour s’adapter aux attentes précises d’une femme restait compliquée pour lui… Et s’entendre reprocher ses choix, même poliment, réveillait sa sensation de ne jamais correspondre aux idéaux de sa mère.

Les acteurs étaient parfaitement choisis pour que l’étincelle se transforme en un psychodrame… Jean-Michel, dont la colère était très audible, traita Aline de radine rigide et contrôlante…  Aline qui répondit, avec une colère plus froide mais tout aussi blessante, qualifiant Jean-Michel d’égoïste immature qui refuse de grandir et ne supporte aucune contrainte.

(Quand les gens qui se disputent ont déjà fait un bout de chemin thérapeutique, les insultes prennent des allures de diagnostic de psychologue)

Autour de la table, tout le monde se sentait triste de voir qu’une belle amitié risquait d’être abîmée… Aucun des autres participants n’ayant les mêmes histoires passées ni les mêmes points sensibles, chacun se demandait pourquoi tout ce remue-ménage d’émotions semblait empêcher de discuter de tout cela rationnellement, entre adultes conciliants…

 

Un débat émotionnel autour des émotions

 

Certains défendaient l’idée que les émotions sont incontrôlables et que, quand elles surgissent, on ne sait rien faire…

D’autres prétendaient, au contraire, qu’il faut à tout prix maîtriser ses émotions et « prendre sur soi » pour préserver la qualité de la relation…

Les premiers, tout en déplorant que les explosions émotionnelles amènent de grands amis à se détester, même momentanément,  rajoutaient que ce sont justement les émotions qui font de nous des êtres humains…

D’autres encore craignaient que le fait de maîtriser ses émotions risquait de  rendre durs ou insensibles…

Le débat allait bon train entre les partisans du contrôle total de ses émotions et les partisans de l’acceptation totale de ses émotions et, pendant une demi-heure chacun défendit ses arguments avec ferveur (et nous n’avions toujours pas décidé comment diviser l’addition)…

De mon côté, j’assistais à tout cela en me disant qu’il y avait là matière à un bel article pour mon site 🙂 et en appréciant le fait que ce délai permettait à Jean-Michel et à Aline de s’apaiser.

Mais la première réflexion qui m’est venue a été celle-ci : « C’est étonnant, nous en sommes toujours dans un débat dualiste dans lequel il semble n’y avoir que deux alternatives opposées : soit le contrôle total des émotions, soit le laisser-aller total des émotions ».

Et c’est toujours la dualité, la réflexion en termes de « l’un OU l’autre » qui est à la base des conflits…

J’étais déjà occupée à chercher comment trouver une voie du milieu, une voie qui appose au lieu d’opposer, la voie du « l’un ET l’autre »…

Comment respecter ses émotions, entendre leurs messages tout en ne subissant pas (et en ne faisant pas subir) leur explosion ?

 

Quelle est l’utilité des émotions ?

Le mot « émotion » vient du latin « emovere » signifiant « bouger hors de », « sortir de »…

C’est donc une énergie qui nous fait bouger, qui nous fait avancer pour éviter une expérience désagréable ou pour reproduire une expérience positive.

Grâce à nos émotions, nous disposons d’un baromètre qui nous indique ce qui nous convient et ce qui ne nous convient pas, d’une boussole précieuse pour conduire notre vie dans la direction qui nous convient.

Les partisans des émotions ont donc tout-à-fait raison de plaider pour qu’on cherche pas à les supprimer.

Mais,  « être hors de soi » poussé à l’extrémité, c’est aussi ne plus bénéficier de toutes ses plus belles potentialités : nous ne sommes pas spécialement au top de nous-mêmes quand nous sommes submergés par nos émotions…

Complètement paralysés ou hurlant de colère, ce n’est pas dans ces états émotionnels-là que nous utilisons au mieux toute notre compassion, toute notre intelligence, toute notre sagesse ni que nous gérons au mieux nos relations.

Les arguments des partisans de la maîtrise des émotions sont donc eux aussi tout-à-fait recevables.

Même si la colère peut être utile pour nous faire respecter… être en colère lorsque quelqu’un abuse de nous, c’est adéquat; rester en colère pendant 1 an suite à une phrase malheureuse (ou mal interprétée) n’est certainement pas adéquat.

 

Les 3 grandes erreurs que nous faisons tous avec nos émotions

 

Erreur n°1 : Confondre les panneaux de signalisation avec la destination

 

Si vous souhaitez aller à Paris, il ne vous viendrait jamais à l’idée de croire que vous êtes arrivé et de vous arrêter lorsque vous voyez le premier panneau de signalisation annonçant Paris…

C’est pareil pour les émotions : elles sont des signaux qui vous indiquent la direction vers l’endroit où vous souhaitez aller… le bonheur !

Une émotion désagréable vous signale que vous faites fausse route…

Une émotion agréable vous signale que vous êtes dans la bonne direction…

Mais aucune de ces émotions n’est une fin en soi…

N’en déplaise aux passionnés qui ne se sentent vivants que sur les montagnes russes émotionnelles…

Aucune de ces émotions n’est la destination finale…

Même si on imagine que le bonheur est une succession ininterrompue de moments d’émotions agréables : ce n’est pas le cas.

Le bonheur c’est de se sentir bien quelle que soit l’émotion que nous vivons, dans les fluctuations des événements positifs et négatifs de la vie.

Utilisez les panneaux de signalisation mais ne vous y arrêtez pas en vous croyant arrivés.

 

Erreur n°2 : Croire que les émotions sont extérieures à nous

 

Vous pensez sans doute qu’il vous est impossible d’empêcher  vos émotions de surgir et de vous envahir à l’improviste…

Et vous avez raison : c’est impossible.

Et ce n’est pas souhaitable puisque, nous l’avons vu, les émotions sont des panneaux de signalisation précieux qui nous permettent d’identifier ce qui est bon ou mauvais pour nous et donc d’avancer vers une vie plus harmonieuse et plus heureuse.

Mais là où vous faites sans doute erreur, c’est lorsque vous les considérez comme des phénomènes extérieurs que vous subissez, un peu comme on subit les phénomènes météorologiques pénibles : on se résigne (ou ou se plaint, ou on enrage) et on attend que cela passe.

Mais nos émotions ne sont pas extérieures à nous puisqu’elles sont complètement dépendantes de la sécrétions de certaines hormones (neurotransmetteurs) par notre cerveau : s’il n’y a pas de support biologique, il n’y a pas d’émotion.

Jusqu’à récemment, les scientifiques pensaient que nous n’avions pas le contrôle sur la sécrétion des neurotransmetteurs… Qu’il existe donc une forme de déterminisme : quelqu’un qui fabrique beaucoup de sérotonine est joyeux, quelqu’un qui en fabrique peu est déprimé. Et on donne des anti-dépresseurs qui permettent d’augmenter le taux de sérotonine dans le cerveau.

Mais, la bonne nouvelle, c’est que nous pouvons apprendre à produire certains de ces neurotransmetteurs plutôt que d’autres.

 

Erreur n°3 : Muscler toujours les mêmes muscles

 

Nous avons tous nos « émotions préférées »… celles que nous connaissons bien, auxquelles nous avons facilement accès.

Certains d’entre nous ont facilement accès à la colère, d’autres à la tristesse, d’autres encore au découragement…

Nos blessures personnelles, notre éducation, nos expériences passées ont façonné la carte des chemins les plus fréquentables et donc les plus fréquentés.

Si l’atmosphère à la maison était lourde et pesante et que l’on vous regardait de travers lorsque vous sautiez de joie, vous avez très rapidement cessé de manifester cette joie, puis, petit-à-petit, vous avez cessé de la ressentir.

Vous avez alors privilégié inconsciemment de ne vous montrer que sous la facette acceptable pour votre entourage de la personne soucieuse et sérieuse.  Progressivement, vous n’avez plus ressenti que les émotions de l’ennui, du souci, voire de la frustration.

De synapse en synapse, un chemin précis s’est créé entre vos neurones… Un chemin qui mène toujours vers ces émotions-là. Votre cerveau a appris à ne fabriquer que de petites doses de dopamine et de sérotonine.

Des chemins neuronaux spécifiques se sont créés… au détriment d’autres chemins.

Un peu comme des traces de skis qui deviennent de plus en plus profondes à force d’être empruntées…

Et qu’il devient de plus en plus difficile de ne pas suivre…

Et que vous suivez donc automatiquement… Contribuant ainsi à les renforcer encore.

Au bout du compte, vous vous retrouvez comme un altérophile qui n’aurait musclé que son biceps gauche : incapable de se servir de son biceps droit.

Vous connaissez parfaitement bien le chemin vers la frustration mais celui vers le contentement est comme une jungle impraticable et vous ne voyez pas qu’il existe (ou qu’il pourrait exister).

 

Comment choisir votre émotion ?

 

Il existe différents moyens de « muscler » les circuits neuronaux nous permettant de ressentir les émotions que nous souhaitons ressentir…

Au début, il faut faire d’énormes efforts (comme pour sortir des traces de skis)…

Ensuite, il faut un peu d’entraînement régulier…

Puis, cela devient facile…

Et, finalement, nous oublions même comment c’était avant…

Contrôler consciemment la posture de votre corps est un des moyens de susciter l’émotion que vous souhaitez…

Par exemple, si vous mettez un crayon dans votre bouche verticalement, après quelques minutes, vous allez vous sentir soucieux, tracassé… Le problème auquel vous réfléchissez va vous sembler de plus en plus difficile à résoudre.

 

Si, par contre, vous placez le crayon horizontalement dans votre bouche, vous vous sentirez rapidement joyeux, malicieux, et vous allez réussir à regarder ce problème avec plus d’humour… Ce qui vous permettra d’y trouver une solution créative.

 

Et si, comme dans la troisième image, vous adoptez ce qu’on appelle « le sourire du Boudha », avec les commissures des lèvres très légèrement remontées vers le haut, il ne vous faudra que quelques minutes pour vous sentir apaisé, serein… Et vous gérerez alors le problème auquel vous faites face avec confiance.

 

Faites l’expérience maintenant !

Se sentir soucieux

Se sentir malicieux

Se sentir serein

 

De nombreux autres « trucs et astuces » existes pour apprendre à faire naître en vous des émotions positives…

Je citerai, par exemple, l’utilisation de souvenirs positifs…

Votre cerveau ne fait pas la différence entre la réalité et l’imaginaire…

Si vous fermez les yeux et que vous imaginez que vous allez devoir sauter à l’élastique dans une heure (allez-y, imaginez cela…), vous sentirez les décharges d’adrénaline provoquer une accélération de votre rythme cardiaque et vous aurez peut-être même les mains moites.

Pourtant, vous êtes toujours assis bien tranquillement devant votre ordinateur…

Vous n’êtes pas au bord d’un pont, vous préparant à vous jeter dans le vide…

Mais vous avez ressenti l’émotion suscitée par ce que vous imaginiez volontairement.

La musique est également une autre astuce pour créer certaines émotions en conscience.

Les cinéastes le savent bien…

Dans un film à suspens, vous pouvez deviner qu’un moment crucial approche uniquement en ressentant l’émotion de peur suscitée en vous par une musique parfaitement choisie dans cette intention précise…

Je suis certaine que, par ces exemples, vous comprenez parfaitement ce que je veux dire : vous êtes parfaitement capable, dès aujourd’hui, de décider de sortir hors de vos traces de skis habituelles… !

Vous pouvez, dès aujourd’hui, commencer à débroussailler le chemin neuronal qui vous mènera vers les émotions que vous souhaitez ressentir !

 

Ne restez pas le jouet de vos émotions mais jouez avec elles !

 

L'exercice audio :

S'entraîner aux émotions positives

 

Dans l’exercice audio, vous serez guidé pour vous apprendre à créer ces nouveaux chemins dans votre cerveau…

En faisant cette méditation régulièrement, les anciennes traces de skis (qui vous entraînent automatiquement vers vos émotions habituelles) vont s’atténuer petit-à-petit.

Vous pourrez utiliser le message constructif envoyé par vos émotions tout en étant très facilement capable de choisir de pivoter vers des émotions positives qui deviendront alors vos « réactions naturelles ».

 

cliquez sur l’image pour écouter l’audio


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Commentaires

  1. j’ai bien aimé ton article..on a vécu une soirée de remake du « prénom » sur un autre theme.. et ton explication illustre parfaitement chacun campé ds sa position..mais je suis curieuse.. comment tu t’en est sortie ce soir là? ou comment vous en etes vous tous sortis? on en reparle..

    1. Author

      Merci, Sophie…
      En fait, on a trouvé un « compromis à la belge » : ceux qui le souhaitaient ont payé ce qu’ils ont consommé…
      Ceux qui préféraient partager ont partagé ce qui restait… 😉

  2. Article très riche (je vais finir par m’y habituer) ! J’aime beaucoup votre façon de vulgariser ces concepts au départ abstrait.
    L’image du biceps gauche faisant référence au cerveau gauche m’a marqué. On retient beaucoup mieux comme ça 🙂

    l’histoire de vos amis me fait beaucoup penser à la dynamique d’un couple. 2 univers distincts qui se « confrontent ». Ca peut créer des étincelles 🙂

    Je partage complètement votre point de vue. En même temps, il est difficile d’aller à l’encontre de la science 🙂 L’importance de l’intelligence émotionnelle dans notre société n’est plus à prouver. Reste plus qu’à l’enseigner à l’école…

    C’est toujours un plaisir de vous lire.
    A bientôt,
    Morgan

    1. Author

      Merci, Morgan… Et j’espère que vous ne vous y habituerez pas 😉

      1. J’ai bien peur qu’il ne soit déjà trop tard.. ! 🙂

        Je viens de lire votre article sur les 7 blessures qui risquent de faire échouer une relation amoureuse et c’est encore le cas 😉

        Au plaisir.
        Morgan

  3. Bonjour Véronique ,
    Ce que j’adore chez vous , ceux sont vos explications claires et vos exemples tres concrets 🙂
    sinon, il me semble que vous avez oubliez un mot dans cette phrase citée ci après : » Mais vous avez ressenti l’émotion suscitée par votre……. ce que vous imaginiez volontairement. »
    Merci encore pour tous vos articles ,
    au plaisir
    Viviane

    1. Author

      Bonjour Viviane,
      Merci de m’avoir signalé l’erreur…
      En fait, il ne manque pas de mot mais il y en a un en trop : le mot « votre ».
      La phrase exacte étant alors, : « vous avez ressenti l’émotion suscitée par ce que vous imaginiez volontairement »
      Encore merci et bien à vous,
      Véronique.

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